« La langue française est notre âme »

Rencontre avec Abdou Fall, Ancien Ministre, Vice-Président de l’Assemblée Nationale du Sénégal

Le Vice-Président du Haut Comité National de la Francophonie a souhaité rencontrer, en décembre 2008, le Vice-Président de l’Assemblée Nationale du Sénégal, pour faire un point sur la perception de la Francophonie dans son pays et sur les nouveaux enjeux que cela implique…

Quelle est la place de la Francophonie ?

L’ancien Président du Sénégal est à la tête de l’OIF et, comme vous le savez, nous tissons des liens particuliers avec la France. Mais il faut se souvenir que déjà, à la Révolution, nous étions présents aux États Généraux de 1789 avec les Cahiers de Doléances. Puis, sous la Commune de Paris en 1860, nous avions nos représentants. Nous étions également présents au Palais Bourbon en 1914 avec le premier député noir, Blaise Diagne. La langue française est dans notre âme. Aujourd’hui, nous sommes viscéralement francophones et francophiles. Nous pensons que c’est un acquis qu’il faut consolider, mais nous devons aussi nous enrichir de la langue des autres. Si l’anglais gagne du terrain, la défense du français reste un patrimoine commun qui nous mobilise fortement.

Cela dit, la francophonie doit s’intéresser davantage aux langues locales pour renforcer la place des langues africaines dans le système éducatif. Le Sénégal présente une particularité intéressante, car si le français est parlé dans les institutions, la langue véhiculaire entre les communautés est le wolof, alors que dans d’autres pays africains, c’est le français. Je suis prêt à accueillir des parlementaires de votre pays qui s’intéressent à ce sujet.

Et je tiens à ajouter que la France a une responsabilité politique en Afrique subsaharienne, car elle est le pays qui nous connaît le mieux. Aujourd’hui, je suis particulièrement déçu par l’aide au développement et les inégalités se poursuivent entre pays riches et pauvres. Il faut une mobilisation générale. L’Occident, et en particulier l’Europe, ont manqué de hardiesse.

Je m’adresse en particulier aux hommes politiques pour qu’ils assument leur responsabilité historique. L’Afrique a besoin d’un « plan Marshall » et la France a un rôle à jouer pour que cette vision soit partagée par l’Europe.

Nous avons des élites très jeunes qui n’ont pas le même type de rapport avec l’Europe et la France, et ils risquent de se diriger vers les États-Unis, la Chine ou l’Inde. C’est une vision d’ensemble ; il faut sortir de la vision comptable.